Parentification (2ème partie)
Quelles sont les causes d’un tel chaos ?
Souvent à l’origine, nous allons observer qu’un enfant a dû faire face à un traumatisme insurmontable :
· Ses parents sont morts trop tôt, par accident, par suicide, par maladie
· sa mère est morte en mettant au monde un autre enfant, abandonnant enfants et mari complètement désemparés
· Sa mère a perdu un enfant, une sœur ou sa propre mère alors qu’elle avait encore besoin de sa présence rassurante
· Sa mère a avorté et se sent coupable d’avoir attenté à la vie d’un être
· Son père est parti à la guerre et n’est jamais revenu
· Un de ses parent a dû faire face à une maladie physique et psychique : cancer, internement psychiatrique, dépression, alcoolisme
· Ses parents l’ont eu alors qu’ils étaient trop jeunes ou que c’était trop tard ou qu’ils ne désiraient pas d’enfant
· Son père est allé en prison
· Sa mère a connu l’inceste ou le viol
Il est né aussi dans un système qui a connu la pauvreté et d’énormes difficultés à survivre. Les mères ont travaillé jeunes et durement, leurs propres mères ne savaient et ne pouvaient que difficilement faire autre chose que donner le minimum matériel : la nourriture, un toit, peu d’éducation.
Il y a eu aussi plusieurs générations de femmes qui ont épousé un homme qu’elles n’aimaient pas ; des raisons d’argent, de terres, de biens conditionnaient leur mariage. Elles faisaient des « mariages arrangés »… Pour certains de ces parents, il était difficile d’aimer leurs enfants.
Certaines filles ont dû être mère alors qu’elles n’avaient qu’une douzaine d’années. En effet elles étaient l’aînée d’une nombreuse fratrie ; leur mère était dépassée, épuisée par autant d’enfants à nourrir, à prendre soin et les frères et sœurs se débrouillaient entre eux, les aînés assumant les plus jeunes.
Autant d’incidents qui ont laissé le système familial bouleversé, incapable d’intégrer la douleur et désorganiser. Ainsi des hommes et des femmes n’ont pas pu assumer leurs places et leurs responsabilités de parents. Ils n’ont pas pu développer l’estime de soi, la confiance, et l’amour d’eux-mêmes. Ils n’ont pas eu la possibilité d’être aidés par leurs propres parents, leur conjoint ou quelqu’un qui puisse leur permettre de dire la douleur qui les submerge, de pleurer leur chagrin, leur honte, de crier leur colère. Ces adultes se retrouvent alors dans une position d’enfants et demandent à leurs propres enfants de l’aide, de l’attention, de façon inconsciente. Ces adultes n’ont pas pu prendre de leurs propres parents qui eux-mêmes ont dû être des parents pour leurs parents ; alors ils se tournent vers leurs enfants pour qu’ils leur donnent énergie, amour, confiance dont ils ont tant manqués.
Bert Hellinger a mis en évidence combien il était important qu’un système soit en ordre pour que l’amour y circule bien. C’est à dire que chacun a une place en fonction de son ordre d’arrivée chronologiquement. Les parents sont nés avant les enfants. Le premier né d’une fratrie ne peut pas se vivre comme étant le deuxième ou le troisième. Une deuxième épouse ne peut se positionner en tant que première femme. Or dans le cas de parentification, il y a perversion de cet ordre. Quelqu’un occupe la place d’un autre, des enfants occupent la place des grands et sont condamnés à donner ce qu’ils n’ont pas reçu
Ainsi se répète l’histoire jusqu’à ce que quelqu’un prenne conscience qu’il crée des perturbations pour son enfant, pour son système, pour lui-même. Certains, pour ne pas répéter, vont prendre le contre-pied en devenant des parents surprotecteurs ; ils se surinvestissent auprès de leurs enfants. Mais ceci est toujours une réaction à une perversion et à ce manque d’attachement, de sécurité qui permet à un enfant de devenir un adulte se respectant, capable de donner de l’attention, du soutien à son tour.
La seule façon de rétablir l’équilibre, l’harmonie est que le parent fasse un travail où il transformera en conscience ce qui l’a fait souffrir. C’est à cette seule condition que le petit enfant peut se sortir des ces confusions et intrications. C’est à cette seule condition que nous pouvons tendre vers un amour conscient et inconditionnel.
Ces conflits nous font perdre la conscience de qui nous sommes en Essence. Notre attention est tellement piégée par nos souffrances, encapsulée dans des croyances limitantes que nous devenons de moins en moins conscients. La Conscience-Vacuité que nous sommes se remplit d’intentions frustrées, de traumatismes non intégrés, de non-dits, d’actes néfastes, d’échecs et s’obscurcit.
Christiane Perreau
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