Ce qui met en péril une relation de couple (4ème partie)

Le principe de l’ordre originel ou de priorité

Ce principe s’appuie sur l’ordre d’arrivée dans le système. Ainsi l’ancienneté d’une personne lui donne préséance sur ceux qui viennent après elle. Cela fait que les enfants viennent après les parents qui sont en dessous des grands parents. Ce principe est valable dans les familles, les couples, les entreprises et quand il est respecté, chacun est à sa place. Et quand chacun est à sa place, cela diminue les risques d’intrications.

Un couple se construit sur un principe d’égalité basé sur l’amour entre un homme et une femme ; les deux partenaires arrivent en même temps, avec ce qu’ils ont et ce qu’ils n’ont pas ; chacun a son histoire avec ses richesses et ses manques. Chacun va apporter ses propres valeurs et après accord des partenaires, certaines de ces valeurs constitueront la base de leur système dont eux seuls seront les garants, les responsables. En cela, ils sont égaux entre eux et il est important qu’ils maintiennent cela en tant qu’adultes.

Tout en accordant la préséance aux systèmes d'origine que sont les parents, un nouveau couple aura à veiller à ne pas se laisser envahir par les parents, les beaux-parents par exemple. Cela ne veut pas dire se refermer sur cette entité couple mais plutôt en préserver l’intimité.

Des enfants seront le fruit de ce système et de cet amour et c’est ainsi que la relation de couple a préséance sur les enfants, l’amour parental venant après l’amour conjugal. Des enfants qui perçoivent un amour solide entre leurs 2 parents qui sont à leur place, seront en sécurité et pourront s’appuyer sur cet amour et être eux-mêmes à leur place.

Ils auront plus d’énergie que les enfants qui sont devenus la priorité du couple ; un couple qui a toute son attention sur les enfants perd de sa puissance et devient trop préoccupé par les enfants qui risquent de se sentir étouffés par les parents. Ce sont des parents qui diront, parfois avec amertume, “nous avons tout fait pour vous” !!! L’amour pour les enfants ne peut être sacrifice. Des parents épanouis donnent de la force aux enfants et l’envie de se réaliser eux-mêmes.

Si un des parents n’est pas à sa place de parent, cela va amener un enfant à prendre la place d’un parent. C’est ainsi que l’on peut voir une fille s’identifier à sa mère qui ne peut être présente pour son mari et ses enfants, car son attention est  prise à nourrir une loyauté à ses ancêtres ; la fille devient alors “la petite femme” de papa ; idem pour un garçon dont papa est absent et qui devient “le petit homme” de maman. Et cela va amener à des attachements  qui persistent durant la vie d’adulte et font obstacles à une relation équilibrée. Ce genre de déséquilibres peuvent conduire à l’inceste lui-même qui laissera des traces douloureuses.

Les enfants ne doivent en aucune façon remplacer les parents, que ce soit en devenant le confident d’un parent, le parent du parent, le représentant d’un premier amour, d’un ex-fiancé ou le petit homme ou la petite femme d’un parent.
Dans leur amour aveugle, les enfants sont prêts à sacrifier leur propre destin pour maintenir l’équilibre du système, qui exerce une telle pression sur eux qu’ils ne peuvent y résister.

Un partenaire peut aussi se comporter en enfant en demandant à son conjoint de combler ses manques d’enfant et cela aussi blessera la relation et le principe d’égalité. Le partenaire est alors submergé, dépassé par de telles demandes auxquelles il lui est impossible de répondre. De telles demandes peuvent être vécues comme des prises de pouvoir. Cela est d’autant plus grave que ce comportement va être perçu par les enfants...

Ce principe d’égalité dans le couple sera aussi  fragilisé quand un des partenaires se conduit en parent, voulant éduquer l’autre, par exemple. Certains hommes, parfois plus âgés que leurs femmes, considèrent qu’ils ont plus d’expériences, qu’ils savent mieux qu’elles ce dont elles ont besoin pour grandir ou oublient de laisser à la porte de leur bureau, de leur cabinet, leurs identités de directeur, de médecin, de professeur. Leurs femmes en souffrent et une hostilité cachée risque de s’amplifier et de se manifester d’une manière inattendue.

Cela se voit aussi chez certaines femmes qui ont des partenaires plus jeunes dont elles deviennent les éducatrices. Autant de comportements qui déséquilibrent l'harmonie et empêchent un approfondissement d’une relation. Nous pourrions nous poser la question de savoir si la profondeur d’une relation qui demande sincérité, authenticité ne fait pas peur à ces couples là !

En cas de séparation, les partenaires des premiers couples, le premier mari, la première femme auront préséance sur les suivants. Ainsi les partenaires des couples suivants devront respecter ceux qui les ont précédés ainsi que les enfants issus de ces premiers amours. En effet, lors d’une deuxième union, l’homme (ou la femme) qui a eu des enfants d’un premier mariage est d’abord un père (une mère) avant d’être un époux (une épouse) pour sa seconde femme (son second mari). Si cela est reconnu par lui et sa nouvelle partenaire, une harmonie plus grande pourra s’instaurer dans cette famille. Et cela évite aux enfants de s’identifier à ceux qui ne seraient pas reconnus.

Une question d’Hélène

Bert Hellinger dit que lorsque qu'un homme qui a déjà une famille fait un enfant avec une autre femme, il devrait aller avec cette femme. J'avoue que cela me semble contradictoire avec ce qu'Hellinger appelle les «ordres». Par exemple lorsqu'il parle de la première épouse et qu'il dit qu'elle doit être honorée comme telle, ou du rang dans la fratrie, ou que les époux sont d'abord des époux avant d'être des parents, il me semble y avoir un ordre de préséance par rapport à l'ordre dans le temps où ces réalités sont apparues.

J'ai de la difficulté à comprendre comment accepter le fait qu'un homme quitte une femme & des enfants avec lesquels il est préalablement engagé pour fonder une nouvelle famille. Il me semble que ce serait une grande injustice envers sa 1ère épouse & ses enfants!!! Peut-être est-ce une des observations d'Hellinger dans son approche phénoménologique pour lesquelles il répond souvent «C'est comme ça, ne me demandez pas de vous l'expliquer, c'est ce que j'ai observé». Pouvez-vous m'éclairer sur ce sujet.

Réponse de Christiane

Oui il y a un ordre de préséance en fonction de l’arrivée dans le système et qui fait qu’une première épouse doit être honorée par une seconde épouse, quelle que soit la raison de la fin de la première union (divorce, décès). Honorer veut dire respecter cette première personne en tant que première ce qui fait que la deuxième épouse se considère la deuxième et ne rivalise pas avec la première ou ne tente pas de prendre la place de première. Sa deuxième place, elle l’a eue parce que la première est partie et a donc libéré une place.

Maintenant quand un homme a un enfant dans une relation extra-conjugale, nous pouvons penser que le lien qui l’unissait à sa première épouse n’est plus aussi dense, qu’il y a déjà rupture et que faire un enfant est alors comme une manière d’anticiper cette séparation. C’est certes une situation très douloureuse pour la première femme et les enfants qui peut réveiller des sentiments d’abandon, d’injustice même.

Mais ce qui est et ce qui se montre, c’est qu’en général la place de cet homme est désormais auprès de cette nouvelle femme et de l’enfant à venir. C’est effectivement quelque chose qui a été observé par Bert Hellinger et qu’il est bon de vérifier lors d’un placement, au cas par cas. Le fait que cet homme aille auprès de la nouvelle compagne n’empêchera pas que la première reste la première et que les enfants du premier mariage auront préséance sur les enfants du second mariage. Et ils devront être reconnus en tant que tels.

Peut être pouvons nous comprendre cet ordre par le fait que la survie d’une espèce, d’une famille, d’un système  se situe dans le futur et non dans le passé. Bien sûr, cette survie s’appuie sur les acquits du passé mais ne doit pas rester figée dans le passé. Si nous avons survécu jusqu’à maintenant, c’est que nous avons su prendre le bon, l’utile de nos ancêtres et nous l’avons fait progresser toujours pour une survie du plus grand nombre.

Par ailleurs, les lois de la survie d’une espèce sont parfois rudes. J’ai eu l’occasion d’observer un mâle hirondelle chasser le mâle précédent avec qui une couvée avait été faite ; pendant 3 jours, j’ai pu voir un réel combat entre les 2 mâles et j’ai découvert un matin les bébés hirondelles qui avaient été mis hors du nid. Et ainsi une nouvelle lignée pouvait naître !!! Chez certains les lions, il y a aussi ce processus et certainement dans d’autres espèces. Peut être sommes nous aussi conditionnés par de tels programmes !?

(à suivre)

Christiane Perreau 

 
 
 

 Bibliographie

(1) (2) ces informations m'ont été transmises par Coline d'Aubret, Présiente de la Fédération des Constellations Familiales et Systémiques (Libre Université du Samadeva) et sont issues d'une conférence donnée par Idris Lahore lors du congrès Sagesse et Corps d'octobre 2008 www.constellations-lahore.com
(3) préséance •  de  pré- et séance - Droit de précéder (qqn) dans une hiérarchie protocolaire. Ordre des préséances dans une assemblée, un cortège. Avoir la préséance sur qqn.  

Pour que l’amour réussisse Bert Hellinger chez Trédaniel textes rassemblés par J. Neuhauser

 
 

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