La femme enceinte et la dépression : impacts sur l'attachement

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Suite de la thèse de docteur en médecine de Maud Perrea,  2éme partie


**  Les troubles du comportement

 

La dépression maternelle qui se prolonge en post-partum perturbe la relation mère-enfant. Le nouveau-né peut alors présenter n’importe quel trouble du comportement de manière à agir sur sa mère comme un objet antidépresseur : troubles du sommeil, de l’appétit, pleurs inexpliqués à répétition, voire véritable maladie psychosomatique. Les pédiatres connaissent bien les cas d’enfants amenés en consultation de manière récurrente par des mamans épuisées qui se plaignent de maux divers pour leur enfant sans qu’ils trouvent de cause organique : coliques, reflux, eczéma. Autant de maux qui remplacent les mots de la mère qui ne peut reconnaître qu’elle va mal. Elle doit s’occuper de son enfant, c’est ce que la société attend de toute mère.

Toutefois, le sujet est de moins en moins tabou et les femmes acceptent plus facilement un rendez-vous avec un psychiatre ou un pédopsychiatre pour parler du bouleversement de leur vie depuis la grossesse et la naissance.

 
**  Le developpement de l’attachement
 
L’attachement du nouveau-né envers sa mère se développe de la naissance jusqu’au neuvième mois de vie du bébé. Une dépression maternelle circonscrite à la grossesse n’aurait donc a priori pas d’impact sur le développement de cette relation. Toutefois, nous l’avons vu la moitié des dépressions prénatales se poursuivent en post-partum. Nous ne pouvons donc pas écarter le risque d’un trouble de l’attachement qui se préparerait dès la période intra-utérine.

De plus, nous ne savons que peu de choses sur les relations materno-foetales, peut-être l’attachement se développe-t-il ou se prépare-t-il déjà in utero ? La théorie de la transmission intergénérationnelle de l’attachement va dans ce sens puisqu’il a été démontré que la stabilité de l’attachement est de l’ordre de 75 à 85%, selon une méta-analyse  de Van Ijzendoorn citée par B. Pierrehumbert (14) .

Or, nous avons dit précédemment que les personnes dépressives avaient majoritairement un attachement insécure. Tout laisse donc penser que les enfants de mères dépressives auront majoritairement un attachement insécure. Mais il n’y a toutefois pas de déterminisme. Par exemple, dans une étude de Fonagy et al (15), portant sur 100 femmes primipares issues de la population générale,  24% des mères autonomes à l’Adult Attachment Interview avaient un enfant insécure selon la Strange Situation,  23% des mères détachées avaient un enfant sécure et 33% des mères préoccupées avaient un enfant sécure. A priori, il est donc possible qu’une mère dépressive ne transmette pas nécessairement son insécurité à son enfant.



Bibliographie

(14)  Pierrehumbert B, Miljkovitch de Heredia R, Halfon O.
Théorie de l’attachement et parentalité.
In : Dugnat M.
Devenir père, devenir mère.
Ramonville Saint-Agne : ed Erès ; 1999. p. 35-51.


(15)  Fonagy P, Steele H, Steele M.
Maternal representations of attachment during pregnancy predict the organization of infant-mother attachment at one year of age.
Child Dev1991; 62:891-905.

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