Mouvement interrompu : partage et commentaire
Nous sommes moins libres que nous le croyons
mais nous avons la possibilité de conquérir notre liberté
et de sortir du destin répétitif de notre histoire
en comprenant les liens complexes
qui se sont tissés dans notre famille.
Anne Ancelin Schützenberger
mais nous avons la possibilité de conquérir notre liberté
et de sortir du destin répétitif de notre histoire
en comprenant les liens complexes
qui se sont tissés dans notre famille.
Anne Ancelin Schützenberger
Partage de Catherine
Avec le temps et des explications franches (?), le ressentiment s'estompe. Mais la confiance, elle, ne revient pas si facilement. Tu as raison, c'est un sorte de mort qui nous rattrape dès que l'on arrête de tourner dans la centrifugeuse de la société. Mais la marque est là, indélébile car la méfiance fait en sorte que l'on ne désire même plus faire le chemin à l'envers pour retrouver le cours "normal" du mouvement. Fut un temps où je désirais ce réconfort, maintenant il me paraît vain et inutile. C'est ce en quoi je te dis que je ne suis pas prête. Peut-être est-ce la peur de souffrir à nouveau ?
La maternité "casse" pour un temps ce cercle infernal et j'ai pensé récupérer le mouvement à ce moment là. Hélas, les enfants quittent le nid et c'est normal, c'est le but de l'éducation qu'on leur apporte. L'oiseau doit un jour voler de ses propres ailes et dans les meilleures conditions possibles. Peut-être les petits enfants me permettront-ils de retrouver cette vie affective si enfouie au fond de moi. Eux seuls, pour le moment, me donneront la force de faire le pas et me laisser-aller en toute confiance vers l'Amour.
Je "fais" beaucoup de choses, mais je ne ressens rien, peut-être quelques fois un peu de révolte ou de colère. Mais à quoi bon ! C'est ça la dépression ? Alors je la traîne depuis longtemps... Ce qui n'empêche pas de se battre à l'extérieur pour sa famille. Quel antagonisme ! La pêche à l'extérieur, la mort à l'intérieur !
Point de vue de Christiane
Voici un partage exprime très bien les mécanismes de survie suite à un un élan interrompu. Les mots en disent long sur cette blessure....
Je ne peux que te dire qu il y a un chemin pour retrouver la confiance, le vouloir vivre et la vie à l’ intérieur au lieu de la mort. Et ce chemin est de vivre nos expériences tramatiques non terminées qui sont là, maintenant et qui prennent beaucoup d’attention, donc d’unités de vie, de présence. Dans un trauma non résolu, non conscientisé il y a beaucoup d’attention, d’énergie bloquées, refoulées. Et pour ne pas être submergés par ce contenu douloureux, nous le maintenons à distance ce qui prend encore beaucoup de présence. C'est l'anatomie du refoulement. Ce cycle passé est le présent. Ou dit autrement, nous ne vivons pas dans le présent et sommes bloqués à l'âge où a eu lieu la blessure.
Un ressentiment qui s’estompe indique qu’il est toujours là. Estompé ne veut pas dire dissout. Le cycle est toujours ouvert et il suffit d’un incident parfois minime du quotidien pour que la douleur soit réactivée. Et quand tu dis “ne plus ressentir” cela indique que, peut être, tu sens déjà beaucoup trop et que tu tentes d'anesthésier le ressentiment et tout ce qui va avec.
Pour dissoudre une souffrance, c’est à dire pour la transformer en conscience et forces de vie, nous devons en faire l’expérience dans le temps présent, de façon consciente et délibérée. Au lieu de subir cette souffrance, au lieu de tenter de l’ignorer, nous la prenons avec nous, en y faisant face, en la traversant, c’est à dire en faisant l’expérience des douleurs et émotions jusque-là bloquées, évitées, refusées car ingérables pour un petit enfant.
Cette expérience va libérer de la charge émotionnelles et permettre, si suffisamment de charge a été dégagée, de conscientiser les résolutions ou décisions prises lors de l’incident. Résolutions qui conditionnent toujours notre temps présent car elles sont enfouies mais pleinement actives ; les programmes comme "je suis seul, je n’ai besoin de personnes, le monde est dangereux" façonnent nos comportements, dictent leurs lois implacables et nous croyons que c' est normal. Certains diront "c’est mon destin, c’est mon karma" !!!
Expérimenter un trauma, c’est entrer en communication avec celui-ci, avec ses affects, avec tout ce qui le constitue ; c’est exprimer ses douleurs, ses mots retenus, ses émotions contenues, tout ce qui empêche d’exister pleinement et sereinement. Ainsi la compréhension naît pour soi, ses schémas, pour les protagonistes de l’histoire, en l’occurrence notre mère, notre père, notre famille. Et rappelez-vous le triangle de la compassion...
Si nous comprenons, nous retrouvons de l’affinité pour les choses et les personnes. Nous retrouvons de l’affinité à aller vers notre mère, notre père, notre propre existence. Et la compréhension est proportionnelle à notre capacité à être effet de la douleur. Plus nous pouvons accueillir ce qui a été, plus nous nous en libérons et retrouvons nos capacités à choisir et assumer nos responsabilités, notre autonomie.
La maternité peut pour un temps effectivement mettre du baume sur la douleur d’un parent ; mais est-ce le rôle d’un enfant de panser les souffrances de son parent ? Est-ce à un enfant de donner l’élan de vie à son parent ? Nous entendons dans les placements et restaurations de mouvements interrompus des enfants en colère, voire en rage, à qui les parents ont volé leur innocence, leur insouciance, leur enfance. et cela se répète souvent depuis plusieurs générations. Ainsi se perpétue la névrose, les dépressions dans les familles.
Et c’est une inversion du flux de vie qui va des descendants vers les ascendants alors qu’il devrait aller des ancêtres vers les nouveaux nés ! Le plus cadeau que nous puissions faire à nos propres enfants n’est il pas d’être soi-même heureux ?! D’être soi-même, entier ?!
Faire beaucoup de choses à l’extérieur pour la famille est peut être un mode de survie ; il est moins douloureux, à un certain niveau, de s’occuper des autres que de s’occuper de sa propre souffrance. S’occuper de sa famille évite parfois de ressentir pleinement le vide et la détresse qui nous habitent. Pour d’autres, s’occuper de la famille est aussi motivé par une intention inavouée de recevoir, en retour, un peu de cet amour, de cette reconnaissance qui ont tant manqué dans l'enfance. Et ainsi ce donner risque d’être fort épuisant...
La colère est une énergie puissante qui permet de retrouver l’élan vital et la capacité à agir. Mais si vient ensuite une contre énergie du genre “à quoi bon, il n’y a rien à faire”, qui fait partie de ces programmes de base de la petit enfance, la colère et l’action seront réprimées. Et quand deux intentions se heurtent ainsi, cela crée de la charge émotionnelle, de la résistance et donc une pression, une tension que nous tenterons d’éliminer par une dé-pression qui entraînera un ton émotionnel bas comme apathie, “la mort à l’intérieur”.
À ce moment là, nous pouvons regarder si le chemin emprunté était bien le bon ou si nous étions assez préparés ou suffisamment accompagnés...
Oui, il y a un chemin. Il est long et demande persévérance mais c ‘est possible. De toute façon si nous ne faisons pas ce chemin... Nous serons “faits” par nos souffrances.. Et c’est comme une dé-faite qui aura un goût amer jusqu’à la fin de nos jours. Que nous reste –t-il alors comme choix : rester sur la défaite ou continuer à nous clarifier, à grandir en conscience afin de retrouver nos certitudes de créateur ? D'ETRE....
Christiane Perreau
Avec le temps et des explications franches (?), le ressentiment s'estompe. Mais la confiance, elle, ne revient pas si facilement. Tu as raison, c'est un sorte de mort qui nous rattrape dès que l'on arrête de tourner dans la centrifugeuse de la société. Mais la marque est là, indélébile car la méfiance fait en sorte que l'on ne désire même plus faire le chemin à l'envers pour retrouver le cours "normal" du mouvement. Fut un temps où je désirais ce réconfort, maintenant il me paraît vain et inutile. C'est ce en quoi je te dis que je ne suis pas prête. Peut-être est-ce la peur de souffrir à nouveau ?
La maternité "casse" pour un temps ce cercle infernal et j'ai pensé récupérer le mouvement à ce moment là. Hélas, les enfants quittent le nid et c'est normal, c'est le but de l'éducation qu'on leur apporte. L'oiseau doit un jour voler de ses propres ailes et dans les meilleures conditions possibles. Peut-être les petits enfants me permettront-ils de retrouver cette vie affective si enfouie au fond de moi. Eux seuls, pour le moment, me donneront la force de faire le pas et me laisser-aller en toute confiance vers l'Amour.
Je "fais" beaucoup de choses, mais je ne ressens rien, peut-être quelques fois un peu de révolte ou de colère. Mais à quoi bon ! C'est ça la dépression ? Alors je la traîne depuis longtemps... Ce qui n'empêche pas de se battre à l'extérieur pour sa famille. Quel antagonisme ! La pêche à l'extérieur, la mort à l'intérieur !
Point de vue de Christiane
Voici un partage exprime très bien les mécanismes de survie suite à un un élan interrompu. Les mots en disent long sur cette blessure....
Je ne peux que te dire qu il y a un chemin pour retrouver la confiance, le vouloir vivre et la vie à l’ intérieur au lieu de la mort. Et ce chemin est de vivre nos expériences tramatiques non terminées qui sont là, maintenant et qui prennent beaucoup d’attention, donc d’unités de vie, de présence. Dans un trauma non résolu, non conscientisé il y a beaucoup d’attention, d’énergie bloquées, refoulées. Et pour ne pas être submergés par ce contenu douloureux, nous le maintenons à distance ce qui prend encore beaucoup de présence. C'est l'anatomie du refoulement. Ce cycle passé est le présent. Ou dit autrement, nous ne vivons pas dans le présent et sommes bloqués à l'âge où a eu lieu la blessure.
Un ressentiment qui s’estompe indique qu’il est toujours là. Estompé ne veut pas dire dissout. Le cycle est toujours ouvert et il suffit d’un incident parfois minime du quotidien pour que la douleur soit réactivée. Et quand tu dis “ne plus ressentir” cela indique que, peut être, tu sens déjà beaucoup trop et que tu tentes d'anesthésier le ressentiment et tout ce qui va avec.
Pour dissoudre une souffrance, c’est à dire pour la transformer en conscience et forces de vie, nous devons en faire l’expérience dans le temps présent, de façon consciente et délibérée. Au lieu de subir cette souffrance, au lieu de tenter de l’ignorer, nous la prenons avec nous, en y faisant face, en la traversant, c’est à dire en faisant l’expérience des douleurs et émotions jusque-là bloquées, évitées, refusées car ingérables pour un petit enfant.
Cette expérience va libérer de la charge émotionnelles et permettre, si suffisamment de charge a été dégagée, de conscientiser les résolutions ou décisions prises lors de l’incident. Résolutions qui conditionnent toujours notre temps présent car elles sont enfouies mais pleinement actives ; les programmes comme "je suis seul, je n’ai besoin de personnes, le monde est dangereux" façonnent nos comportements, dictent leurs lois implacables et nous croyons que c' est normal. Certains diront "c’est mon destin, c’est mon karma" !!!
Expérimenter un trauma, c’est entrer en communication avec celui-ci, avec ses affects, avec tout ce qui le constitue ; c’est exprimer ses douleurs, ses mots retenus, ses émotions contenues, tout ce qui empêche d’exister pleinement et sereinement. Ainsi la compréhension naît pour soi, ses schémas, pour les protagonistes de l’histoire, en l’occurrence notre mère, notre père, notre famille. Et rappelez-vous le triangle de la compassion...
Si nous comprenons, nous retrouvons de l’affinité pour les choses et les personnes. Nous retrouvons de l’affinité à aller vers notre mère, notre père, notre propre existence. Et la compréhension est proportionnelle à notre capacité à être effet de la douleur. Plus nous pouvons accueillir ce qui a été, plus nous nous en libérons et retrouvons nos capacités à choisir et assumer nos responsabilités, notre autonomie.
La maternité peut pour un temps effectivement mettre du baume sur la douleur d’un parent ; mais est-ce le rôle d’un enfant de panser les souffrances de son parent ? Est-ce à un enfant de donner l’élan de vie à son parent ? Nous entendons dans les placements et restaurations de mouvements interrompus des enfants en colère, voire en rage, à qui les parents ont volé leur innocence, leur insouciance, leur enfance. et cela se répète souvent depuis plusieurs générations. Ainsi se perpétue la névrose, les dépressions dans les familles.
Et c’est une inversion du flux de vie qui va des descendants vers les ascendants alors qu’il devrait aller des ancêtres vers les nouveaux nés ! Le plus cadeau que nous puissions faire à nos propres enfants n’est il pas d’être soi-même heureux ?! D’être soi-même, entier ?!
Faire beaucoup de choses à l’extérieur pour la famille est peut être un mode de survie ; il est moins douloureux, à un certain niveau, de s’occuper des autres que de s’occuper de sa propre souffrance. S’occuper de sa famille évite parfois de ressentir pleinement le vide et la détresse qui nous habitent. Pour d’autres, s’occuper de la famille est aussi motivé par une intention inavouée de recevoir, en retour, un peu de cet amour, de cette reconnaissance qui ont tant manqué dans l'enfance. Et ainsi ce donner risque d’être fort épuisant...
La colère est une énergie puissante qui permet de retrouver l’élan vital et la capacité à agir. Mais si vient ensuite une contre énergie du genre “à quoi bon, il n’y a rien à faire”, qui fait partie de ces programmes de base de la petit enfance, la colère et l’action seront réprimées. Et quand deux intentions se heurtent ainsi, cela crée de la charge émotionnelle, de la résistance et donc une pression, une tension que nous tenterons d’éliminer par une dé-pression qui entraînera un ton émotionnel bas comme apathie, “la mort à l’intérieur”.
À ce moment là, nous pouvons regarder si le chemin emprunté était bien le bon ou si nous étions assez préparés ou suffisamment accompagnés...
Oui, il y a un chemin. Il est long et demande persévérance mais c ‘est possible. De toute façon si nous ne faisons pas ce chemin... Nous serons “faits” par nos souffrances.. Et c’est comme une dé-faite qui aura un goût amer jusqu’à la fin de nos jours. Que nous reste –t-il alors comme choix : rester sur la défaite ou continuer à nous clarifier, à grandir en conscience afin de retrouver nos certitudes de créateur ? D'ETRE....
Christiane Perreau