Prendre ses Parents : qu'est ce que cela veut dire ? (1ère partie)
Pour beaucoup de personnes, cette expression "Prendre ses Parents" faire réagir plutôt négativement. "Comment puis-je les prendre alors qu'ils m'ont battu, maltraité, abandonné, rejeté ? Comment puis-je prendre ma mère alors qu'il n'y avait RIEN entre nous ? Comment puis-je prendre mon père alors que je ne peux que le haïr ?"
Ces questions et réactions légitimes montrent qu'une énorme souffrance reste chez ces personnes ; certaines ont travaillé pour la transformer, avec plus ou moins de succès. Mais elles restent insatisfaites ; leurs relations sentimentales sont difficiles, celles avec leurs propres enfants manquent d'harmonie. Un sentiment d'incomplétude les habite toujours, plus ou moins.
Et s'il manquait une étape dans leur parcours pour retrouver l'amour pour eux-mêmes, leur famille, la vie ?
La pensée de Bert Hellinger, fondateur de cette méthode des "constellations familiales" nous apporte une piste originale qui facilite la métamorphose de notre héritage familial en force de vie.
Travaillant depuis presque 20 ans avec cette méthode, j'ai dû constater, à maintes reprises, combien cette approche pouvait réduire le fossé entre un enfant -même maltraité, même abusé" et son parent. Cela ne veut pas dire qu'un parent devienne autre de ce qu'il est ou a été.
Cela veut dire que l'enfant puisse faire l'expérience de ses blessures et prendre conscience que son parent a été et est peut-être encore sous l'emprise des dysfonctionnements de son clan et que son amour reste bloqué dans le passé, enfoui sous la souffrance non intégrée du clan.
L'enfant sort de sa vision étriquée et élargit son regard aux souffrances que ses ancêtres ont vécues et dont il n'ont su que faire. Qu'ont pu faire ces femmes face à leurs hommes, de retour de la guerre 14/18, détruits physiquement et psychiquement ? Qu'a eu cette femme de sa propre mère, morte en couches et qui a emporté avec elle son mari, miné par le chagrin, le désarroi ?
Cela ne veut pas dire que cet enfant doive prendre en charge la douleur des siens. En tant qu'enfant il l'a fait pour assurer sa survie et l'appartenance à sa famille. Il n'a pas eu d'autre choix ! Mais en tant qu'adulte, responsable de son histoire et de son autonomie, il peut séparer le grain de l'ivraie. Il peut laisser à ses aïeux leur propre souffrance, leurs propres responsabilités. Je dirais même qu'il doit laisser à ses ancêtres leurs fardeaux et prendre le bon, c'est-à-dire la vie. Sans eux, cet enfant ne serait pas vivant !!
Alors, il y a ce basculement où l'enfant prend conscience que, malgré toutes ses souffrances, IL EST EN VIE et que cette vie s'est perpétuée grâce à tous ceux qui l'ont précédé, au-delà de leurs comportements, de leurs douleurs. Ce n'est pas quelque de chose de mental, c'est une expérience profonde voire bouleversante qui participe à la métamorphose.
Alors la personne peut dire et vivre cette phrase libératrice :
« je prends ce que vous m’avez donné. C’est beaucoup et cela suffit, je me débrouille tout seul pour le reste et je vous laisse en paix. Je prends ce que j’ai reçu, et, bien que je vous quitte, je ressens que j’ai des parents et que mes parents ont leur enfant ». (1)
"Ainsi accepter de prendre a donc l'étonnante conséquence d'aider à se séparer." (2)
"De plus, chacun a quelque chose de particulier, qui lui est propre qu'il doit prendre et développer, indépendamment des parents. Cela ne se réalise pas contre les parents, mais cela complète l'ensemble." (3)
Bonne lecture et si vous avez envie de témoigner, ce sera avec plaisir que je vous lirai et publierai vos réflexions ou expériences si vous m'en donnez l'autorisation.
Christiane Perreau
(1) (2) (3) extraits du livre « Les liens qui libèrent » du Dr Gunthard Weber