La loyauté familiale (2ème partie)

Publié le par Christiane Perreau

« À l’intérieur de la communauté de destin que constitue la famille ou le clan,et sur la base de l’attachement et de l’amour par attachement, il règne un besoin irrésistible de rééquilibrage entre l’avantage des uns et le désavantage des autres, entre l’innocence et le bonheur des uns et la culpabilité et le malheur des autres, entre la santé des uns et la maladie des autres, entre la vie des uns et la mort des autres.
 
Ce besoin irrésistible fait que quelqu’un veut aussi devenir malheureux, si un autre l’est devenu, que si un autre est tombé malade ou devenu coupable, quelqu’un en bonne santé ou innocent devient malade ou coupable, et que si quelqu’un de proche meurt un autre proche veut mourir aussi.

Il s’agit d’un amour, qui par sacrifice, espère guérir la personne aimée, la préserver d’un mauvais sort, peut-être expier sa faute et la délivrer du malheur.
Cet amour espère aussi pouvoir ramener la personne aimée de chez les morts, même si elle est déjà morte.”
Bert Hellinger, La Constellation Familiale et Cure d’Âme
 
Rendre visibles ces “loyautés invisibles

En Constellations,  nous parlons d’intrications ou identifications inconscientes et nous identifions ce désordre sous la dynamique « je vais expier pour tes fautes ou pour mes fautes, je vais payer ma dette au clan ». Ce principe de loyauté se retrouve tant sur le plan vertical, traversant les générations que dans l’horizontalité dans les relations au sein d’une fratrie, d’un couple.
 
Voici quelques exemples qui illustrent ce principe de « loyauté familiale » :
 
  • Un enfant est gravement malade physiquement et psychiquement. Après investigation de leurs systèmes familiaux respectifs, les parents découvrent que les arrières grands parents paternels ont fait fortune dans des plantations de canne à sucre en Guadeloupe, au détriment d’esclaves. Cet enfant expie les torts causés par ses arrières grands parents.
  • Un jeune homme brillant en est à sa troisième faillite dans un domaine florissant qu’est l’informatique. Après un temps de succès, son entreprise dérape ce qui met à mal sa survie et celle de sa famille. Nous découvrons que sa grand-mère a gagné beaucoup d’argent en abusant d’autres personnes.
  • Un père tombe en dépression profonde ; il a été impliqué dans un accident de voiture qui a coûté la vie à un conducteur.  Il se sent coupable d’avoir ôté la vie à cet homme et d’être, lui, resté en vie.
  • Une jeune fille est schizophrène ; la mise en place de son système montre qu’un de ses ancêtres a tué une personne pour un motif que l’on ignore. Cette jeune fille est alors identifiée à la victime et au meurtrier. (dans les cas psychiatriques, la personne est loyale au bourreau et à sa victime).
  • Une jeune fille est souvent prise de crises d’angoisse qui la paralysent et la font se replier sur elle-même, apathique, à tel point qu’elle ne vit plus normalement et ne peut continuer ses brillantes études. Elle est sous le joug d’une “loyauté invisible” à son arrière grand mère qui, sous l’emprise d’un moment de folie, a tué 2 de ses enfants. Elle paie pour cet acte destructeur.
  • Un homme a un grave cancer des reins. Ses jours sont en danger. Il a fait appel à des techniques parallèles dont de la psychothérapie pour comprendre les causes de cette maladie, mais rien ne bouge vraiment. La constellation fait apparaître qu’il voue une haine profonde à son père et la lignée paternelle où a sévi maltraitance et violence physique et psychique.  Quand il lui est proposé de s’incliner devant ce père, après avoir reconnu les souffrances de l’un et de l’autre, il refuse de le reconnaître comme son père. C’est du genre “plutôt mourir que m’incliner devant toi”. En fait, il se fait payer, par la maladie, cette infidélité et la dette qu’il a envers son père, celle d’avoir reçu la vie,...

Dans de telles circonstances, il ne s’agit pas de pardonner ; il s’agit de comprendre de façon holistique les mécanismes qui pervertissent le système et amène une personne à être sous l’emprise aveugle d’une “loyauté invisible”. Le chemin est de permettre à la personne de faire face aux blessures reçues et causées. Seul ce face à face peut la délivrer de la transe et de l’identification dans laquelle elle est. Il s’agit de reconnaître ce qui a été, les souffrances de chacun, sans aucun jugement, et de comprendre ce qui s’est passé pour les personnes ayant souffert d’injustices, d’actes nuisibles, de comportements aberrés. Ce comprendre, c’est prendre avec soi, c’est intégrer au lieu d’exclure. C’est la voie de sortie de la désintégration, des répétitions.
 
Nous travaillerons de manière à permettre aux personnes intriquées de se désidentifier des fardeaux et histoires qu’elles ont repris à leur compte. Et nous devrons trouver une juste place à chacun, y compris pour les malfaiteurs, persécuteurs. Il n’est pas question d’exclure qui que ce soit, ce qui maintiendrait le joug de la « loyauté invisible ». Rappelons-nous que toute personne a le même droit d’appartenance à son système, y compris l’alcoolique, le violent, le persécuteur.  Ainsi, un climat de réconciliation, d’apaisement peut s’instaurer ; l’ordre, garant d’une bonne survie et de relations apaisées, va émerger. Même si cela peut exiger un travail profond et assidu, les malédictions peuvent s’arrêter….
 
 
(à suivre)
 

 

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